Assaut clérical ?

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On parle toujours trop *

En France, les sectes sont un non-problème 1

 De deux choses l'une: ou bien il s'agit d'une étape, une de plus, d'un plan savamment orchestré devant conduire à une modification substantielle des rapports entre l'Etat et les églises, ou bien il s'agit d'une maladresse. 4

Dans les deux cas, cette intervention est troublante:

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gestion se voulant moderne de l'état qui met au premier plan des conseillers. Qui, en cascade, suscite l'habitude des journalistes , insolite quand elle devient à ce point systématique, de solliciter des interviews de ces mêmes conseillers. Qui produit une cruelle inversion des rôles où désormais c'est au président de corriger ou expliquer la pensée de ses conseillers plutôt qu'aux conseillers d'éventuellement expliciter la parole et la volonté politique. Il n'est pas faux de dire que ce sont ici les fondamentaux de la gestion démocratique du pouvoir qui sont en jeu . Ceci ne justifiait sans doute pas - pas encore? - un manifeste en appelant à la vigilance démocratique mais légitime qu'on s'interroge sur cette manière d'exercer le pouvoir qui, décidément, ressemble plus au management d'une entreprise privée qu'à la direction politique d'un état démocratique. De la désignation du premier ministre comme un collaborateur, à la mise en place d'une évaluation des ministres, à l'omniprésence des conseillers qui commence à agacer les politiques eux-mêmes, il y a tout un faisceau d'indices laissant à supposer que le temps du politique est bafoué.

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la loi de 1905 aura eu, en reléguant le religieux dans la sphère publique, un effet immédiat : l'Etat ne reconnaît ni ne finance aucun culte. L'état n'a donc à reconnaître le statut de religion à rien ni personne, en conséquence n'a pas à se prononcer sur le caractère sectaire ou non de telle ou telle association. Ce n'est certainement pas un hasard si n'existe pas en tant que tel le de définition de ce qu'est une secte. La France, contrairement à l'Espagne par exemple, n'a donc pas, ne peut pas, reconnaître le statut de religion à tel ou tel. Si problème sectaire il y a c'est en tant qu'il se poserait en terme de sécurité publique, d'atteinte à l'ordre public etc. et relève ainsi effectivement du ministère de l'intérieur. De ce point de vue, mais ce n'est évidemment pas le sens de l'intervention de Mme Mignon, les sectes sont effectivement un non problème politique. Tout débat visant à fustiger la France pour une atteinte présumée à la liberté d'opinion ou d'expression est donc un contre sens volontaire ou non que commettent tous ceux qui cherchent à repenser nos rapports au religieux à l'aune de la grille anglo-saxonne.
On n'a pas tord d'y voir une reconnaissance implicite des communautés, quand la République ne connaît que des citoyens, et le risque est grand, à vouloir transmettre aux prêtres cette charge de l'éducation des jeunes  - un rôle jusqu'ici imparti aux parents et instituteurs - d'abandonner à des groupes qu'on ne pourra plus ne pas reconnaître ni subventionner ce qui fait le fonds des fonctions régaliennes de l'état.
C'est bien ceci qui reste en jeu derrière cette anecdote, maladresse ou  feinte orchestrée.

Cléricature

Si quelque chose de constant semble émerger de la pensée présidentielle -  mais est-ce seulement la sienne ou bien plutôt celle de ses conseillers? - cela tiendrait plutôt au constat qu'il croit pouvoir faire de l'incapacité de la société moderne à cimenter une espérance assez forte pour assurer la cohérence de la nation. Désir implicite, parfois explicité, d'aller chercher du côté du religieux ce que le politique ne peut assurer, angoisse du dirigeant réalisant soudainement son impuissance à changer le réel comme il le souhaiterait, cet appel au religieux équivaut selon moi à une reddition en rase campagne, à un aveu d'impuissance politique. Et c'est bien tout le drame de Sarkozy qui s'était précisément fait élire sur la base de la restauration du politique.

Nous voulions un président; nous avons un ministre du culte.

 

En France, les sectes sont un non-problème », a déclaré Emmanuelle Mignon, la directrice de cabinet de Nicolas Sarkozy, dans une interview à «VSD» *. Sollicitée dans le cadre d’un article intitulé « Scientologie : la secte américaine vise la respectabilité. Pourquoi la France laisse faire », Emmanuelle Mignon affirme : « Quant à la scientologie, je ne les connais pas, mais on peut s’interroger. Ou bien c’est une dangereuse organisation et on l’interdit, ou alors ils ne représentent pas une menace particulière pour l’ordre public et ils ont le droit d’exister en paix.»

Dès la parution de l’article ce 20 février, ces propos ont suscité une série de réactions. L’intéressée par le biais d’un communiqué de l’Elysée a démenti avoir fait de telles déclarations, assurant « n’avoir jamais tenu les propos qui (lui) sont prêtés par l’hebdomadaire “VSD” ». « Interrogée de manière informelle sur les positions du président de la République, j’ai rappelé la position constante de Nicolas Sarkozy sur ce sujet », a-t-elle ajouté. Pour sa part, «VSD»” maintient, dans un communiqué, les informations publiées : « M. Emmanuel Fansten, journaliste à “VSD, a rencontré Mme Emmanuelle Mignon à son bureau de l’Élysée le mercredi 6 février, de 11 heures 15 à 12 heures. La rédaction de “VSD” confirme que les propos cités dans l’entretien ont bien été tenus dans le cadre de ce rendez-vous.»

* Lire l’article dans VSD n°1591 (du 20 au 26 février 2008)

 

Sectes : polémique après les propos de la directrice de cabinet de M. Sarkozy

LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 20.02.08 | 13h49  •  Mis à jour le 20.02.08 | 19h14

 

ans un entretien publié mercredi 20 février par l'hebdomadaire VSD, Emmanuelle Mignon, directrice de cabinet du président Nicolas Sarkozy, affirme que "les sectes sont un non-problème" en France. Des propos qu'elle a démentis, après leur publication. Dans l'interview publiée par l'hebdomadaire, Emmanuelle Mignon explique :"La lutte contre les sectes a longtemps permis de dissimuler les vrais sujets. Mais, en France, les sectes sont un non-problème." "La liste établie en 1995 est scandaleuse", ajoute-t-elle, faisant référence à la liste des "mouvements sectaires" mise au point par la Commission parlementaire d'enquête sur les sectes.

Elle s'en prend également à la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes). Questionnée par VSD sur l'éventuelle suppression de cette organisation chargée de surveiller les sectes et leur évolution en France par le gouvernement actuel, elle répond : "Non, mais plutôt la transformer en quelque chose de plus efficace et en finir avec le bla-bla. A part publier des rapports annuels, la Miviludes ne fait rien.""Quant à la Scientologie [qui figure sur la liste des sectes], je ne les connais pas, mais on peut s'interroger. Ou bien c'est une dangereuse organisation et on l'interdit, ou alors ils ne représentent pas de menace particulière pour l'ordre public et ils ont le droit d'exister en paix", souligne Emmanuelle Mignon.

"MÉCONNAISSANCE TOTALE DU SUJET"

Emmanuelle Mignon a écrit certains des discours les plus contestés de Nicolas Sarkozy sur la religion et la laïcité, en particulier celui de Latran, et inspiré sa dernière initiative, également contestée, concernant le "parrainage" par chaque élève de CM2 d'un enfant juif français tué par les nazis. Elle a démenti les propos parus dans VSD précisant qu'"interrogée de manière informelle sur les positions du président de la République dans ce domaine", elle se serait contentée de rappeler"la position constante de Nicolas Sarkozy sur ce sujet". Mais la direction de VSD a maintenu mercredi après-midi que les "propos cités dans l'entretien ont bien été tenus, dans le cadre [d'un] rendez-vous" de quarante-cinq minutes qu'a eu le journaliste Emmanuel Fansten avec Mme Mignon, à l'Elysée, le 6 février.

Ces propos ont en tous cas déclenché une salve de critiques mercredi. "Même amendés, [ces propos] relèvent au minimum, d'une méconnaissance totale du sujet" s'est emporté le député UMP Alain Gest, auteur du rapport de la commission d'enquête sur les sectes de 1995 et membre du conseil d'orientation de la Miviludes."C'est ignorer les difficultés et les souffrances rencontrées par de très nombreuses familles confrontées à des déviances sectaires. C'est limiter à quelques mouvements très médiatisés un phénomène qui concerne, en réalité, une multiplicité de petits organismes qui manipulent nombre de nos concitoyens",  a déploré le député, ajoutant "c'est, une fois de plus, commettre l'erreur, en parlant de liberté de conscience, de rapprocher sectes et religions... comme le souhaitent les mouvements sectaires les plus connus."

LA SCIENTOLOGIE SE RÉJOUIT DES PROPOS DE MME MIGNON

Julien Dray, porte-parole du Parti socialiste, a déclaré mercredi que "dans les mois à venir, l'ensemble du camp laïque va devoir descendre dans la rue pour exprimer cette nécessité et cet impératif" de défendre la loi de 1905 de séparation de l'Eglise et de l'Etat. François Bayrou, président du MoDem, a lui jugé mercredi "infiniment troublants" les propos sur la Scientologie d'Emmanuelle Mignon.

La Scientologie s'est, elle, félicité des propos de Mme Mignon : "La France évolue dans le bon sens, a estimé Danielle Gounord, du service de communication du mouvement. Elle s'aligne désormais sur la majorité des pays européens." La Scientologie est considérée comme une secte dans les rapports parlementaires français, mais bénéficie du statut de religion dans d'autres pays comme les Etats-Unis.

En déplacement à Noyelle-Godault, il a prôné «la plus grande fermeté» vis-à-vis des sectes. Mais la polémique continue.

AFP

Nicolas Sarkozy a prôné jeudi à Noyelle-Godault «la plus grande fermeté» vis-à-vis des sectes, «les activités sectaires» étant selon lui «inacceptables, inadmissibles». Le Président répondait à la presse, en marge d’une visite sur l’ancien site de Metaleurop, à Noyelles-Godault, dans le Pas-de-Calais, sur la polémique déclenchée par les propos de sa directrice de cabinet, Emmanuelle Mignon, à l’hebdomadaire VSD, sur les sectes, propos qu'elle a partiellement démentis.

Emmanuelle Mignon «a elle-même contesté ces propos. En ce qui concerne les sectes, ma position a toujours été claire: les activités sectaires sont inacceptables, inadmissibles, il faut faire preuve de la plus grande fermeté», a déclaré Sarkozy. «Ce n’est pas à moi de dire si la Scientologie est une secte. Il y a une commission» pour cela, mais «je n’ai jamais eu la moindre faiblesse avec eux (ndlr: les Scientologues) quand j’étais ministre de l’Intérieur», a-t-il également affirmé. «Chacun sait ce que j’ai fait en la matière».

Alors ministre de l’Economie, Nicolas Sarkozy avait reçu en 2004 l’acteur américain Tom Cruise, adepte de ce groupe.

Dans les propos qui lui sont attribués mercredi par VSD, Emmanuelle Mignon déclare que «la lutte contre les sectes a longtemps permis de dissimuler les vrais sujets. Mais, en France, les sectes sont un non-problème». «La liste établie en 1995 est scandaleuse», y ajoute-t-elle en évoquant la liste des «mouvements sectaires» de la Commission parlementaire d’enquête sur les sectes. «Quant à la scientologie», qui figurait dans cette liste, «je ne les connais pas, mais on peut s’interroger», estime-t-elle.

Interrogé sur la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), le chef de l'Etat a affirmé qu’il ne s’agissait «pas de [la] réformer». «Qu’elle fasse son travail, qu’elle soit, sévère avec toutes les activités sectaires qui abusent de la faiblesse de pauvres gens. Et puis voilà! On n’a pas à changer des structures tous les six mois. Ce qu’il faut, c’est obtenir des résultats ici comme ailleurs», a-t-il ajouté.

4) ce que pense Raffarin lorsqu'il déclare que
«S’exprimer, c’est un métier. On ne passe pas de l’ombre à la lumière sans éclat. Et donc, ce genre de polémique, on s’en passerait, surtout en période électorale.»

5) voir sur ce sujet le dossier accessible sur le site de l'Assemblée Nationale

*Le Monde daté du 23 février lui consacre une page