Freud

Introduction à la psychanalyse

FreudEn ce qui concerne les tendances sexuelles, il est évident que du commencement à la fin de leur développement, elles sont un moyen d’acquisition de plaisir et elles remplissent cette fonction sans faiblir. Tel est également au début, l’objectif des tendances du moi. Mais sous la pression de la grande éducation qu’est la nécessité, les tendances du moi ne tardent pas à remplacer le principe de plaisir par une modification. La tâche d’écarter la peine s’imposent à elles avec la même urgence que celles d’acquérir du plaisir; le moi apprend qu’il est indispensable de renoncer à la satisfaction immédiate, de différer l’acquisition de plaisir, de supporter certaines peines et de renoncer en général à certaines sources de plaisir. Le moi, ainsi éduqué est devenu raisonnable , il ne se laisse plus dominé par le principe de plaisir, mais se conforme au principe de réalité qui, au fond, a également pour but le plaisir, mais un plaisir qui, s’il est différé et atténué, a l’avantage d’offrir la certitude que procurent le contact avec la réalité et la conformité à ses exigences.


Malaise dans la civilisation

Si la civilisation impose d’aussi lourds sacrifices, non seulement à la sexualité mais encore à l’agressivité, nous comprenons mieux qu’il soit si difficile à l’homme d’y trouver son bonheur. En ce sens, l’homme primitif avait en fait la part belle puisqu’il ne connaissait aucune restriction à ses instincts. En revanche la certitude de jouir longtemps d’un tel bonheur était minime. L’homme civilisé a fait l’échange d’une part de bonheur possible contre une part de sécurité. Mais n’oublions pas que dans la famille primitive, le chef seul jouissait d’une pareille liberté de l’instinct; les autres subissaient en esclaves son oppression. Le contraste entre une minorité profitant des avantages de la civilisation et une majorité privée de ceux-ci était donc, à cette époque reculée du développement humain, poussé à l’extrême. des renseignements plus exacts sur les mœurs des sauvages actuels nous ont appris qu’il n’y avait nul lieu d’envier la liberté de leur vie instinctive: ils étaient en effet soumis à des restrictions d’un autre ordre, mais plus sévères encore peut-être que n’en subit le civilisé moderne.
Si nous reprochons à juste titre à notre civilisation actuelle de réaliser aussi insuffisamment un ordre vital propre à nous rendre heureux - ce que pourtant nous exigeons d’elle - ainsi que de laisser subsister tant de souffrances vraisemblablement évitables; si d’autre part nous nous efforçons, par une critique impitoyable, de découvrir les sources de son imperfection, nous ne faisons, certes, qu’exercer notre bon droit; et en cela nous ne nous déclarons pas ennemis. C’est également notre droit d’espérer d’elle, peu à peu, des changements susceptibles de satisfaire mieux à nos besoins et de la soustraire ainsi à nos critiques. Toutefois, nous nous familiariserons peut-être à cette idée que certaines difficultés existantes sont intimement liées à son essence et ne sauraient céder à aucune tentative de réforme.


Psychologie de la vie amoureuse

Aussi étrange que cela paraisse, je crois que l’on devrait envisager la possibilité que quelque chose dans la nature même de la pulsion sexuelle ne soit pas favorable à la réalisation de la pleine satisfaction (...) Premièrement, en raison de l’instauration en deux temps du choix d’objet avec, entre les deux, l’intervention de la barrière contre l’inceste, l’objet final de la pulsion sexuelle n’est plus l’objet originaire d’une motion de désir, mais seulement son substitut. Or, la psychanalyse nous a appris ceci: lorsque l’objet originaire d’une motion de désir s’est perdu à la suite d’un refoulement, il est fréquemment représenté par une série infinie d’objets substitutifs, dont aucun ne suffit pleinement.