Paradoxe de la révolutionRupture ou continuitéL'irruption du peuple: une temporalité suspendueLes refus révolutionnaires
|
Le paradoxe de la révolutionOn le sait le terme est d'abord d'origine astronomique et désigne l'orbite décrite par une planète autour de son point fixe; ce qui signifie retour en arrière ! Comme si finalement une révolution politique changeait moins qu'on ne le dit, moins qu'on ne le croit! ou que C'est d'ailleurs la thèse de Tocqueville et elle n'est pas complètement fausse, qui pointe, notamment, combien la révolution n'a ni changé la tendance centralisatrice de ce pays, ni la mentalité de rentiers de ses dirigeants. Il n'empêche que révolution signifie changement brusque, voire brutal, et que, pour ne prendre que cet indice, les trois quarts de la richesse nationale aura changé de mains entre 1789 et 1815, ce qui n'est pas rien. Révolution signifie à tout le moins redistribution des cartes. La France, on le sait, fut une abonnée complaisante de ces crises : de 89 à 1830, de 1848 à 1871 pour ne parler que du 19e siècle. Mais on ne peut taire non plus ni la Révolution Nationale d'un Pétain, ni l'épisode si controversé de mai 58 ! Tout semble se passer comme si la France avait été incapable de se moderniser, d'évoluer sans à coups alors même que ce pays est fortement conservateur tant dans sa démarche que dans son histoire. A la fois, fille aînée de l'Eglise et patrie de la Révolution, la France semble bien cette patrie du paradoxe qui ne sait donner le pouvoir à la gauche que de manière fugace et presque honteuse, ou ne le lui confie qu'au moment où elle cesse d'être dérangeante (l'épisode Mitterrand) ! Rupture ou continuitéIndissolublement liée à la philosophie du progrès, la Révolution se veut victoire contre les préjugés, la tradition. Elle installe ce moment si particulier où il semble qu'avant de pouvoir construire l'ordre nouveau, il importe préalablement de mettre à bas l'ancien. La démarche n'est pas si éloignée de celle, théorétique d'un Descartes. La Révolution, c'est la méthode en acte, c'est l'instant du doute ! C'est celui du provisoire ! Ce sera tout l'objet du discours et de la pratique post-révolutionnaire que de proclamer, précisément, que la révolution ne sut fonder l'ordre nouveau, mais seulement détruire l'ancien. Sa rupture, elle la marquera notamment par le calendrier révolutionnaire : recommencer la numérotation, c'est ensemencer l'ère, supposer une rupture telle que l'histoire à nouveau, puisse se décliner en un avant et un après. C'est en même temps, paradoxalement, s'inscrire dans la tradition chrétienne d'une philosophie de l'histoire courant vers son terme, sauf à considérer que ce terme ne se réaliserait plus de manière continue mais discontinue. Toute la question reste de savoir quoi de la rupture et de la continuité est apparence, quoi, réalité! Les soubresauts de l'histoire ne sont-ils que des illusions laissant en réalité la nation intacte ou, au contraire, bouleversent-ils en substance en ne laissant subsister que des illusions de continuité. Ce qui me semble sûr, c'est que la mort du roi crée un point de non retour dont la France aura du mal à se remettre politiquement puisqu' elle mettra presque un siècle avant de trouver un semblant de stabilité institutionnelle. C'est, qu'entre la souveraineté royale et la souveraineté -nationale ou populaire - il y a un fossé infranchissable : si la démocratie peut s'accommoder d'un roi, en revanche entre souveraineté royale et populaire il y a contradiction flagrante que la condamnation de Louis XVI va sanctifier. Qu'on le veuille ou non, le 21 Janvier 1793, interdit en réalité, toute Restauration : toutes les tentatives du 19e siècle restèrent fragiles et, au moins depuis 1945, le courant monarchiste ne survit qu'au prix d'un folklore nostalgique qui lui ôte tout poids politique. L'irruption du peupleTrès intéressante de ce point de vue la définition qu'en donne Wikipédia :
La révolution ce n'est pas seulement un changement brusque, c'est, surtout, une brèche, un interstice, creusé dans le fil ordinaire de l'histoire. Avec la Révolution, le temps ordinaire est suspendu et nombre d'acteurs ne songent qu'à une chose : en finir avec cette exception. En ces temps extrêmes, tout semble possible et rien des pesanteurs, ni historiques, ni sociologiques, ni idéologiques, ne semble pouvoir rien freiné. Le miracle de la Révolution, ce pourquoi il draine souvent derrière lui sa cohorte de symboles, de mythes et de force sacrée, tient entièrement dans cette suspension de l'ordre ordinaire! De ce point de vue, la révolution a les mêmes caractéristiques que la fête telle que l'avait définie R Caillois : moment d'exception qui se nourrit de lui-même et illustre parfaitement la distinction sacré / profane1, dont la violence fait partie intégrante au moins dans le sens où cette dernière non seulement n'interrompt pas le processus mais le réalise. Elle incarne ainsi non un moment mais une instance fondatrice, quelque chose comme cet arrière-plan sacré, inquiétant mais toujours engageant qui va fonctionner comme la référence ultime, le modèle ( à suivre ou à repousser ) : c'est bien ainsi qu'elle fonctionne, deux siècles après, dans le discours républicain et c'est bien tout le malheur de la gauche de ne plus pouvoir faire fonctionner 1917, de la même manière. Le fond de l'affaire c'est bien l'irruption du peuple dans le processus, ce qui bouleverse tout puisque, subitement, le référent devient acteur, et que donc plus aucune symbolisation, plus aucune représentation politique classique ne peut fonctionner. Irruption sans doute violente, nécessairement, puisqu'elle incarne à la fois un refus et une affirmation. Refus péremptoire de se laisser voler sa révolution, d'être trahi, affirmation de la volonté populaire comme la seule source de légitimité. L'épisode de fin Août 92 et des journées de Septembre, pour violent qu'il fut, traduit d'abord cette radicale opposition entre les temps ordinaires du jeu politique où les élus représentent le peuple et ne le peuvent faire que si ce dernier vaque à ses ordinaires occupations, et cette temporalité, comme suspendue à l'aune de l'ire populaire, où subitement tout devient possible parce que le représenté fait le jeu. La révolution est donc, de ce point de vue, le contraire du politique Peut-être pourrait-on avancer à propos du politique ce que Lacan affirmait de l'inconscient : il est structuré comme un langage. Or dans le langage la signification s'élabore à partir du rapport signifiant/signifié et certainement pas à partir du référant. Le signe est arbitraire, on le sait : il en va de même ici. La représentation politique ne peut fonctionner qu'à condition de cet éloignement du référent : d'où le refus du mandat impératif, présent jusque et y compris dans la constitution de 58, mais justement pas dans celle de 93. Les refus révolutionnairesIls sont, me semble-t-il au nombre de trois:
|
sur la temporalité politique
voir
voir également
et
ceci