Remaniement

Dépolitisation

C'est sans doute l'une des contradictions les plus fortes du discours présidentiel !

D'un côté l'affirmation du retour de la politique, de la volonté, de la réforme. De l'autre cette tentation irrésistible à transformer le politique en simple collaborateur technicien. Ce qu'illustre cette curieuse et inédite annonce, quatre mois avant l'événement, d'un remaniement ministériel dont nul ne sait s'il sera profond ou simplement un replatrage mais dont l'organisation même démine l'éventuelle signification politique qu'il eût pu avoir.

C'est ce qu'illustre la dernière intervention d'Hollande! *

«Nous arrivons au mois de novembre, je ne sais pas quand interviendra le remaniement, il est annoncé depuis quatre mois, ce qui fait que nous avons le sentiment qu’il n’y a plus de gouvernement», a estimé M. Hollande sur «Dimanche soir politique» I-Télé/France Inter/Le Monde.

«Vous avez un Premier ministre (François Fillon) qui fait ses discours d’adieu, régulièrement. Vous citez les prétendants qui viennent à la télévision dire combien leur cause mérite d’être défendue, d’autres qui viennent pleurnicher pour savoir s’ils y seront encore (…) Voilà la situation», a-t-il asséné. 1

 

Se souvient-on de cette expression "collaborateur" que Sarkozy avait utilisé au tout début de son mandat pour désigner Fillon ? Se souvient-on seulement de cette annonce de 2007 visant à faire évaluer les ministres par un cabinet privé ? 2 La dyarchie de la Ve République aura toujours été difficile à vivre et nul doute que la prééminence du président fera toujours qu'un remaniement ministériel n'est plus à entendre comme une crise ainsi que ce fut le cas sous les IIIe et IVe : il n'empêche, ce furent toujours - à tout le moins - des signes politiques. Désormais on en est à la réorganisation d'une équipe, à un ajustement.

Cet événement est un non événement sinon il eût été impossible de l'annoncer à l'avance.

Paradoxe ou contradiction ?

Paradoxe parce qu'il est évident qu'après les deux dernières années de Mitterrand rongé par la maladie et la cohabitation, après les deux mandats chiraquiens plombés par la cohabitation si longue et par un singulier manque de sens et de courage politiques, le moment était effectivement venu de l'action. Sur quoi toute la campagne de 2007 avait surfé. Mais contradiction surtout parce que le modèle sarkoziste n'est pas politique mais entrepeneurial, managerial. Sarkozy n'est jamais que le grand patron d'un CAC 40 qui s'appellerait la France ! L'hyper-présidence n'en était que le signe ! 3 L'hyperbole permanente, la précipitation aussi !

Cette manie désormais de tout entendresous le vocable de séquence comme si l'action politique n'était qu'un plan de comm dont il fallait régler, ajuster les dispositifs en est l'autre !

Séquence politique après la séquence sécuritaire , Voyons !

Je ne sais par quelle fenêtre le politique reviendra ! mais il reviendra et le choc n'en sera que plus troublant !

 



François Hollande - Dimanche soir politique - 30/10/2010
envoyé par blog_francoishollande. - L'actualité du moment en vidéo.

1)dans Libération

2) revoir

3) voir ITV de Cl Bébéar sur le Monde

Qu'est- ce qui a coincé ? La méthode ?

Nicolas Sarkozy a voulu aller vite. Il considère que si on ne fait pas les réformes dans un certain laps de temps, on ne les fait jamais. De plus la crise financière a créé une obligation de s'attaquer tout de suite à la réduction des déficits. Nicolas Sarkozy a cru que le dossier des retraites était déjà bien préparé. C'est vrai que le sujet ne date pas d'aujourd'hui . Il y a trente ans, nous, les assureurs, avions confié à deux jeunes économistes, Denis Kessler et Dominique Strauss -Kahn, une étude sur le financement des retraites. Ils concluaient à la nécessité de créer des fonds de pension. Mais la culture économique reste faible dans notre pays. Il faut prendre le temps d'expliquer. Et les Français ont une relation très particulière au travail. Ils sont productifs, appréciés comme tels à l'étranger. En même temps ils dénigrent le travail, se disent fatigués, aspirent aux congés, à la retraite. Au Canada, aux Etats-Unis jamais vous n'entendrez un tel discours.

Laurence Parisot estime que les entreprises ne sont pas responsables de la mauvaise insertion des jeunes sur le marché du travail . Partagez-vous son avis ?

Non, nous sommes tous responsables de cette situation. Et les entreprises sont de plus en plus nombreuses à reconnaître qu'elles ont une responsabilité sociétale. Les difficultés que connaissent les jeunes ont des causes multiples, qui tiennent à l'éducation, aux erreurs d'orientation, au mauvais fonctionnement du marché du travail, à cette stupidité que représente le contrat à durée déterminée, devenu le moyen d'utiliser le personnel comme variable d'ajustement. Il faut le supprimer et le remplacer par un contrat de travail unique , avec des droits renforcés au fil des ans . Pour créer un électrochoc, certains évoquent l'idée de quotas de jeunes en entreprise. Je n'y suis pas hostile à condition que le système soit temporaire. Et surtout qu'on ne vienne pas faire dire aux entreprises : vous prenez des jeunes ou vous payez une pénalité financière. C'est terriblement dévalorisant.

Quel regard portez-vous sur l'action de Nicolas Sarkozy ?

Il a beaucoup réformé mais sa méthode est stressante. Or, il a une grande capacité d'explication. Tout en restant offensif, il faut qu'il adopte un style moins agressif, qu'il explique , car il a une grande capacité d'explication et qu'autour de lui aussi on explique. C'est aujourd'hui possible car les partenaires sociaux sont beaucoup plus ouverts au dialogue. Propos recueillis par Françoise Fressoz et Philippe Le Cœur