Impuissance

A propos de l'article du Monde daté du mercredi 3 Novembre :
Dépenses de l’Etat: grosses coupes, petites économies

D'où, chose remarquable, ... rien ne s'en suit !

On comprend la chose, on ne peut qu'en souligner l'effet désastreux. Les mécanismes budgétaires complexes ont assurément leur pesanteur, leur lenteur ... mais quel contraste avec l'affichage politique volontaire qui est celui de nos dirigeants depuis 3 ans !

C'est l'autre versant de la paradoxale dépolitisation avec celui, techniciste, managérial, que nous avons déjà souligné !

Indéniablement, il y a ici méprise sur le sens même du politique et, vraisemblablement, méconnaissance complète du temps du politique. Ce que souligne cette remarque de Villepin citée dans un autre article de Libération :

Pour Dominique de Villepin, l’autopromo de Fillon confirme «une sorte d’inversion des responsabilités» avec «un Premier ministre capable de rappeler au président de la République qu’il y a un temps long, qu’il faut agir et s’inscrire dans la durée» tandis qu’il reste au chef de l’Etat «l’impatience du quotidien, la gestion des affaires courantes». 1

Nous avons déjà souligné 2 l'importance du temps long dans la logique du pouvoir, qui contraste si violemment avec l'obsession de la séquence qui anime la marche élyséenne. Ce qu'il faut considérer ici l'effet : celui de l'impuissance !

Se souvenir qu'en 97 Chirac a aussi raté sa dissolution pour ne l'avoir justifiée que par l'obligation de se soumettre à la nécessité incontournable de la mondialisation. Alors, aucun projet, aucune volonté politique claire qui fût affichée, seulement cette morne soumission au fait, quelque chose comme un réalisme défaitiste et bien tristounet. On ne sollicite pas le peuple, on ne le fait pas se déplacer pour qu'il se soumette.

Aujourd'hui en si radicale opposition avec le volontarisme de l'hyperprésidence, non seulement on risque effectivement d'inverser les positions en plaçant la présidence dans la mêlée quand elle devrait jouer l'arbitrage; non seulement on cerne le pouvoir dans le temps cours de l'acte, de l'actualité qui est nécessairement aussi celui de l'échec et de la controverse systématique, non seulement on cours le risque d'élargir le sentiment d'injustice en ne semblant réussir que lorsqu'il s'agir d'empiéter sur les acquis mais surtout par des coups de force, en brisant le dialogue social, mais surtout on le place dans la position peu enviable de l'échec et de l'impuissance en n'entamant que des réformes qui ne résolvent rien.

Doit-on rappeler que la réforme de 2003 était déjà supposée résoudre la question des retraites quand on nous suggère dès aujourd'hui que celle de 2010 n'est qu'une étape qu'il faudra accentuer en 2018? doit-on rappeler que les dispositions autour des régimes spéciaux aboutirent finalement à des économies de bout de chandelle ? Et voilà qu'on nous dit que les coupes sombres dans le budget de l'Etat, les saignées dans les effectifs de la fonction publique n'aboutiront qu'à de bien modestes économies ?

Bigre : quand on la joue rigueur et professionnalisme ! Nul besoin d'être grand clerc pour affirmer qu'un outil qui produit moins qu'il ne coûte est un mauvais outil !

Une décision politique qui produit un si fort mécontentement social pour un résultat quasi nul .... cela s'appelle un échec ! Non ?


1)Libération du 5 nov , Dans le match pour Matignon, Fillon veut reprendre la main

2) relire mais aussi