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La chute du moral des ménages en France hypothèque la croissance

Tel est le titre d'un article publié par le monde le 4 Janvier 08.

Sans être économiste, et peut-être parce que je ne le suis pas, il m'a toujours semblé que ce type de raisonnement fréquemment trouvé dans la presse, sitôt qu'il s'agit de prospective sur la croissance, comportait quelque chose de fallacieux !

Depuis des années l'on entend que la croissance française tenait plus à la consommation intérieure qu'aux exportations : on comprend bien alors pourquoi il est si urgent de comprendre et sonder les moteurs de la consommation des français.

Pour autant!

Paralogisme

On peut admettre que des facteurs psychologiques viennent influer nos comportements de consommateurs, néanmoins je soupçonne derrière ceci comme un sulfureux parfum de paralogisme.

Pour établir une corrélation étroite entre le moral - l'indice de confiance en l'avenir - et la consommation des ménages encore faudrait-il avoir établi que celui-là fût la seule cause, au moins la cause principale de celle-ci ! Or il semble en réalité que la cause essentielle en fût plutôt le pouvoir d'achat. C'est bien parce que les budgets sont désormais tellement étriqués que les ménages ne consomment plus - ou moins -  et sans doute est-ce plutôt la dure réalité de travailleur pauvre qui fait baisser le moral

En l'affaire on inverse cause et conséquence ! 1

Ce qui semble plus pervers encore c'est la représentation idéologique que ceci suppose: ne pas consommer parce que l'on n'en a pas les moyens renvoie plutôt une image raisonnable de français gérant sagement leur budget alors que l'autre représentation renvoie une image frivole et capricieuse des français!

Quoi?

N'est-ce pas encore une autre manière de concéder la dissolution du politique dans l'économique: au fond il n'est plus de citoyens mais uniquement des consommateurs !

Il est ici le ver dans le fruit : non dans la prise en compte de la perspective économique mais dans la seule prise en compte du prisme économique !

Inutile de revenir sur l'aveuglement ou bien cette autre forme de naïveté qu'est la soumission à une forme dégradée de métaphysique consistant à s'en remettre aux vérités ultimes d'une science dont on attend à la fois vérité et morale : elle illustre à l'envi combien notre époque loin d'être soumise à la rationalité demeure plus que jamais victime d'une religiosité dégradée et dangereuse.

Désolation

Mais il y a plus grave: prise d'un point de vue sartrien, cette réduction du citoyen au consommateur n'est rien moins qu'une réification où se joue quelque chose du crime contre l'humain dans la mesure où l'on ne retient plus de l'homme que sa capacité à consommer et donc à générer de la plus value et non sa capacité à devenir et donc à donner du sens à sa présence au monde.

C'est au fond exactement ce que dit Arendt dans la célèbre interview qu'elle donna dans les années 60 à la télévision allemande : cette réduction au seul travail, à la seule consommation fait de lui un être acosmique, isolé du monde, atomisé ! où Arendt voit une des formes du totalitarisme.

Tandis que l’isolement intéresse uniquement le domaine politique de la vie, la désolation intéresse la vie humaine dans son tout. Le régime totalitaire comme toutes les tyrannies ne pourrait certainement pas exister sans détruire le domaine public de la vie, c’est-à-dire sans détruire, en isolant les hommes, leurs capacités politiques. Mais la domination totalitaire est un nouveau type de régime en cela qu’elle ne se contente pas de cet isolement et détruit également la vie privée. Elle se fonde sur la désolation, sur l’expérience d’absolue non-appartenance au monde, qui est l’une des expériences les plus radicales et les plus désespérées de l’homme.

L'homme, réduit à sa seule condition d'homo faber  perd le contact autant avec le monde politique qu'avec son propre entourage : réduit à ne pouvoir s'affirmer qu'en cédant à sa pulsion consumériste, il n'est plus considéré qu'en tant que tel.

Arendt le dit: seule la pensée, et l'art sans doute, restent pour lui manière d'échapper à cette désolation.

Mais que dire quand la pensée elle-même aura cédé ainsi à ces sirènes ?

1) C'est d'ailleurs cette même inversion qu'observe J Viléo dans le Monde du 18/12/07 à propos de l'ouverture de certains magasins le dimanche :

Beaucoup pensent que cela relancera la consommation et donc la croissance. Cela est faux car la croissance précède la consommation et non l'inverse. C'est parce qu'il y a production et donc distribution de revenus que les individus peuvent consommer. Le raisonnement qui consiste à dire que la consommation stimule la croissance est présent dans beaucoup de discours économiques, mais il est faux car il confond la cause et la conséquence entre les différentes opérations économiques.

2) L'atteinte à la vie privée se retrouve dans les analyses faites dans cet article

En résumé, l'ouverture des magasins le dimanche accélèrera la désintégration de la famille, améliorera les profits des entreprises et donc les dividendes des actionnaires, sans résoudre le problème de fond qui reste le chômage de masse résultant des délocalisations.